N°38 – Revolution! Revolution!

December 29, 2024

Tbilisi, 18th December

It’s freezing. In the evening, temperatures drop below zero. Rustaveli avenue in front of the Parliament is as packed as the metro at rush hour. It’s the 21st day of protest, and it seems like the whole of Tbilisi has come out, despite the cold, the enraged police that are lined up to get us, and those inside the parliament building who are still refusing to hear us.

I have to admit, three weeks ago I didn’t feel as hopeful. Since the pro-Russian Georgian Dream party “won” the legislative election (Georgia’s President, Salome Zourabichvili, and opposition parties refuse to recognise the validity of the results because of allegations of fraud and ask for a new election, ed.) at the end of October, the number of the people out on the streets was steadily diminishing. On the 25th November, when the parliament held its first session, I expected lots of people to come out in protest. But it was a freezing cold day, it was raining, and actually very few people turned up.

It was really miserable. It really felt like the whole country had just completely given up, and nihilism was taking over. And the government was hoping to capitalise on that nihilism.

Then everything changed on the night of the 28th November. The Georgian Prime Minister Irakli Kobakhidze announced that the government would pause negotiations to join the EU. When I heard the statement, I was in my house doing some renovation, and I felt furious. Being part of the EU is essential for Georgia, because the only alternative to the European path is to be in the Russian orbit. I thought to myself: “Okay, will there be a protest now?”

Literally, not even half an hour later, people started going down to the parliament building. I decided to go as well, though, I have to admit, my expectations were not high at all. But as soon as I got there, I realised it was unlike any protest I’d ever seen before.

Nobody had organised a demonstration, people just assembled there, instinctively almost. People were banging on the metal barricades, booing, shouting and screaming, “leave the government, leave the government!”. One guy started shouting, quite quietly to be honest, “Revolutsia, revolutsia!” (“Revolution, revolution”, ed) Then others joined the chant.Somebody brought a megaphone, and people, ordinary citizens, made really passionate speeches.

As I was listening to them, I anticipated that the reaction from the authorities would be on a different scale. So, I went back to mine, picked up all my gear, tear gas mask, helmet, press stuff, and went back down. And I was right. The crackdown was brutal that night.Police used tear gas, demonstrators were dragged along and beaten to the ground and hundreds were arrested and tortured.

But people now come prepared for brutality. They bring flags and posters, but also huge water bottles– to neutralise the tear gas–, others bring thick industrial gloves –the canisters are really hot when activated– as well as gas masks.

What’s happening now is very different from the mass protests in March (in March 2023 a series of demonstrations took place in opposition to the “Law on Transparency of Foreign Influence”, legislation that requires NGOs and media outlets that receive more than 20% of their funding from foreign sources to register as organizations “pursuing the interest of a foreign power”, ed). It’s not just young people. Civil servants are resigning, making statements, people are walking out of their offices. There are IT workers, mothers and teachers all teaming up and joining us on the streets. Today, I saw Barcelona and Real Madrid supporters marching together!

It also goes beyond the capital. There are unprecedented crowds in Batumi, even small towns and villages are joining in, which is very rare.

For over two weeks now I have spent every night in the same place, I’ve been sleep deprived and scared that myself or my friends would end up in prison. But I am also incredibly proud of Georgian people who keep going out there, and they won’t stop until they are heard. We won’t stop until we’re heard and new elections are announced.

Masho

Masho is a young freelance journalist based in Tbilisi. Since the 28th November, she has spent day and night outdoors with the tens of thousands of Georgians calling for new parliamentary elections. She tells us about the evolution of this citizens’ revolt.

 

This story was originally published in our In Vivo newsletter. To receive other similar stories with cultural recommendations every fortnight, subscribe to our free newsletter.

N°38 - Révolution ! Révolution !

December 29, 2024

Tbilissi, le 18 décembre 2024

Il fait très froid. Le soir, les températures chutent dans le négatif. Mais l’avenue Rustaveli, en face du parlement, est pleine comme un métro à l’heure de pointe. C’est le 21e jour de contestation et on dirait que tout Tbilissi est dans la rue. Malgré le froid, malgré la police enragée alignée dans l’attente de nous attraper et malgré les parlementaires à l’intérieur du bâtiment qui refusent toujours de nous écouter.

J’avoue qu’il y a à peine trois semaines, je n’aurais pas pu imaginer ça, je n’avais pas tant d’espoir. Depuis qu’à la fin du mois d’octobre le parti pro-russe Rêve géorgien a « gagné » les élections législatives (la présidente de la Géorgie, Salomé Zourabichvili, et les partis d’opposition refusent de reconnaître la validité des résultats en raison de fortes suspicions de fraude et demandent de nouvelles élections, ndlr.), le nombre de personnes dans les rues n’avait cessé de diminuer.

Le 25 novembre, lorsque le Parlement a tenu sa première session, je m’attendais, comme beaucoup, à ce que les gens se mobilisent et descendent dans la rue. Mais non. Le temps était glacial. Il pleuvait et très peu de gens sont venus au rassemblement.

J’assistais à un triste spectacle. On avait vraiment l’impression que le pays tout entier abandonnait, que le nihilisme prenait le dessus. Et le gouvernement espérait bien capitaliser sur ce sentiment.

Tout a changé dans la nuit du 28 novembre, quand le Premier ministre géorgien, Irakli Kobakhidze, a annoncé que le gouvernement allait interrompre les négociations d’adhésion à l’Union européenne. À ce moment-là, j’étais chez moi, en train de faire des travaux de rénovation. Lorsque j’ai entendu ces mots, j’étais furieuse. Faire partie de l’UE, c’est essentiel pour la Géorgie, car l’unique alternative au chemin européen qui s’offre à nous, c’est d’être dans l’orbite russe. Donc après ça, je me suis dit : « Bon, il va y avoir une manifestation là ? »

Au bout d’une demi-heure, littéralement, les gens ont commencé à se rendre au parlement. J’ai décidé d’en faire de même, bien que, je dois l’admettre, mes attentes quant à ce rassemblement n’étaient pas élevées du tout. Mais dès que je suis arrivée, j’ai réalisé que cette manifestation ne ressemblait à rien de ce que j’avais vu auparavant.

Personne n’avait appelé à la mobilisation, les gens sont simplement sortis de chez eux et ont pris la même direction, presque instinctivement. Iels tapaient sur les barricades métalliques, huaient, hurlaient : « Quittez le gouvernement, quittez le gouvernement ! » Un type a commencé à crier — assez doucement, au début pour être honnête, ce n’était même pas vraiment un cri — : « Revolucia, revolucia ! » « Révolution, révolution ! », ndlr) Et d’autres se sont joints au chant. Puis quelqu’un a apporté un mégaphone et des gens, des citoyen·nes ordinaires, ont prononcé des discours vraiment passionnés.

Alors que je les écoutais, j’ai réalisé qu’à cette vitesse la réaction des autorités allait, elle aussi, prendre une autre ampleur. Je suis donc retournée chez moi. J’ai ramassé tout mon matériel, mes masques à gaz, mon casque, mon équipement de presse, et je suis redescendue. J’ai bien fait. La répression a été brutale cette nuit-là. La police a utilisé des lacrymos, des manifestant·es ont été trainé·es et frappé·es au sol, des centaines de personnes ont été arrêté·es et torturé·es.

Mais aujourd’hui, les gens se préparent à cette violence. Lors des manifestations, ils apportent des drapeaux et des affiches, mais aussi d’énormes bouteilles d’eau — pour neutraliser les grenades lacrymogènes —, d’autres apportent des espèces de gants industriels épais — les grenades sont très chaudes lorsqu’elles sont activées — et des masques à gaz.

Ce qui se passe aujourd’hui est très différent des précédentes manifestations de mars (au printemps de cette année et en mars 2023, une série de manifestations a eu lieu en opposition à la « loi sur la transparence de l’influence étrangère », qui exige que les ONG et les médias qui reçoivent plus de 20 % de leur financement de sources étrangères s’enregistrent en tant qu’organisations « poursuivant les intérêts d’une puissance étrangère », ndlr.). Les jeunes ne sont pas les seul·es à se mobiliser. Des fonctionnaires démissionnent et s’expriment publiquement. Des informaticien·nes, des mères de famille, des enseignant·es se regroupent et nous rejoignent dans la rue. Tout le monde est concerné. Aujourd’hui, j’ai même vu des supporters du FC Barcelone et du Real Madrid défiler ensemble !

Et le mouvement ne se limite pas à la capitale. Il y a des regroupements sans précédent à Batumi (la deuxième plus grande ville de Géorgie, située sur les rives de la mer Noire, ndlr.), et même des petites villes et des villages se joignent à nous — ce qui est très rare !

Cela fait maintenant plus de deux semaines que je passe mes nuits au même endroit, que je manque de sommeil et que j’ai peur que mes amis ou moi finissions en prison. Mais je suis aussi incroyablement fière du peuple géorgien qui continue de manifester. Nous ne nous arrêterons pas tant que nous n’aurons pas été entendu·es. Nous ne nous arrêterons pas tant que de nouvelles élections ne seront pas annoncées.

Masho

Masho est une jeune journaliste indépendante basée à Tbilissi. Depuis le 28 novembre, elle passe ses jours et ses nuits dehors avec les dizaines de milliers de Géorgien·nes qui réclament la tenue de nouvelles élections législatives. Elle nous raconte l’évolution de cette révolte citoyenne.

 

Ce témoignage a d’abord été publié dans notre newsletter In Vivo. Pour recevoir d’autres histoires similaires assorties de recommandations culturelles toutes les deux semaines, abonnez-vous gratuitement à notre newsletter.

N°38 - Rivoluzione! Rivoluzione!

December 29, 2024

Tiblisi, 18 dicembre 2024

Fa molto freddo. La sera le temperature vanno sottozero. Ma viale Rustaveli, di fronte al Parlamento, è pieno come una metropolitana all’ora di punta. È il 21° giorno di proteste e sembra che tutta Tbilisi sia in strada, nonostante il freddo, una polizia infuriata e allineata pronta a fermarci, e nonostante le persone che stanno in Parlamento ancora si rifiutino di ascoltarci.

Devo ammettere che solo tre settimane fa non avrei potuto immaginare tutto questo, non avevo così tante speranze. Da quando il partito filo-russo Sogno Georgiano ha “vinto” le elezioni parlamentari (la presidente georgiana Salome Zurabishvili e i partiti di opposizione si rifiutano di riconoscere la validità dei risultati a causa di forti sospetti di brogli, e chiedono nuove elezioni, ndr) alla fine di ottobre, il numero di persone in piazza è andato costantemente diminuendo. Il 25 novembre, quando il Parlamento ha tenuto la sua prima sessione, io, come molti altrз, mi aspettavo che la gente si mobilitasse e scendesse in piazza.

Faceva un freddo cane. Pioveva e c’erano pochissime persone.

È stato molto triste. Avevamo davvero l’impressione che l’intero Paese si stesse arrendendo, che il nichilismo stesse prendendo il sopravvento. E il governo sperava di capitalizzare proprio questo nichilismo.

Tutto è cambiato la notte del 28 novembre, quando il primo ministro georgiano, Irakli Kobakhidze, ha annunciato che il governo avrebbe interrotto i negoziati per l’adesione all’Unione europea. In quel momento ero a casa e stavo facendo dei lavori di ristrutturazione. Quando l’ho saputo, ho perso le staffe. Diventar parte dell’UE è essenziale per la Georgia, perché l’unica alternativa all’Europa è gravitare nell’orbita della Russia. Così, dopo questa notizia, mi sono detta: “Beh, ci sarà una manifestazione adesso?”

Dopo mezz’ora, letteralmente, la gente ha iniziato ad accorrere verso il Parlamento. Ho deciso di andare anch’io in quella direzione, anche se, devo ammettere, le mie aspettative su questa mobilitazione erano basse. Ma non appena sono arrivata, mi sono resa conto che questa sembrava ben diversa da tutte quelle che avevo visto prima.

Nessunə aveva indetto la manifestazione, la gente ha semplicemente iniziato a presentarsi, quasi istintivamente, batteva sulle barricate di metallo, fischiava e gridava: “Lasciate il governo, lasciate il governo!”. Un tipo ha iniziato a urlare  molto piano, a dire il vero, non era nemmeno un grido – :“Revolucia, revolucia!”, e altrз si sono unitз. Poi qualcunə ha portato un megafono e alcune persone, cittadinз comuni, hanno tenuto discorsi davvero appassionati.

Mentre lз ascoltavo, ho capito che di questo passo anche la reazione delle autorità avrebbe assunto un’altra dimensione. Così sono andata a casa, perché abito a 10 minuti dal luogo della manifestazione. Ho preso tutto il mio equipaggiamento, le maschere antigas, l’elmetto, la cartella stampa e sono uscita. Ho fatto la cosa giusta. La repressione è stata brutale, quella sera. La polizia ha usato i gas lacrimogeni, з manifestanti sono statз trascinatз e buttatз a terra, centinaia sono stati gli arresti e le torture.

Ma oggi la gente è preparata a questa violenza. Alle manifestazioni з partecipanti portano bandiere e manifesti, ma anche enormi bottiglie d’acqua –

per neutralizzare le granate lacrimogene –, altrз portano questi spessi guanti industriali – le granate sono molto calde quando vengono attivate – e maschere antigas.

Quello che sta accadendo oggi è molto diverso dalle grandi manifestazioni di marzo (nella primavera di quest’anno e nel marzo 2023, si sono svolte una serie di proteste in opposizione alla “Legge sulla trasparenza dell’influenza straniera”, che impone alle ONG e ai media che ricevono più del 20% dei loro finanziamenti da fonti straniere di registrarsi come organizzazioni che “perseguono gli interessi di una potenza straniera”, ndr). з giovani non sono lз unicз ad agire. Funzionarз si dimettono e parlano pubblicamente. Informaticз, madri e insegnanti si stanno mobilitando in gruppi e si uniscono a noi nelle strade. Tuttз sono preoccupatз. Oggi ho persino visto tifosз del Barcellona e del Real Madrid marciare insieme!

E il movimento non si limita alla capitale. Ci sono raduni senza precedenti a Batumi (la seconda città più grande della Georgia, sulle rive del Mar Nero, ndr), e anche piccole città e villaggi si stanno unendo a noi – una cosa molto rara!

Da oltre due settimane passo le notti nello stesso posto, non riesco a dormire e temo che io o з miз amicз finiamo in prigione. Ma sono anche incredibilmente orgogliosa che il popolo georgiano continui a manifestare. Non ci fermeremo finché le nostre voci non saranno ascoltate. Non ci fermeremo finché non saranno annunciate nuove elezioni.

Masho

Masho è una giovane giornalista freelance di Tbilisi. Dal 28 novembre trascorre le sue giornate e le sue notti all’aperto con le decine di migliaia di georgianз che chiedono nuove elezioni parlamentari. Ci ha raccontato come si sta sviluppando questa rivolta popolare.

 

Questa testimonianza è stata pubblicata in origine sulla nostra newsletter In Vivo. Per ricevere ogni quindici giorni altre storie simili con consigli culturali, iscriviti alla nostra newsletter gratuita.

 

Stay tuned!
Subscribe to
our newsletter

Stay tuned!
Subscribe to
our newsletter